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Ma vie, c'est du bonheur à ne plus savoir qu'Enfer. Journaliste littéraire et culturelle pour le BSC News Magazine, je suis une passionnée, amoureuse de la vie et boulimique de mots. Ceux que je dévore à travers mes très nombreuses lectures, et ceux qui se dessinent et prennent vie sous ma plume. Je travaille actuellement à l'écriture d'un roman, d'un recueil de poèmes ainsi que d'un recueil de tweets. A mes heures perdues, s'il en est, j'écris des chansons que j'accompagne au piano. Mon but dans la vie ? Réaliser mes rêves. Work in progress... LES TEXTES ET POÈMES PRÉSENTS SUR CE BLOG SONT PROTÉGÉS PAR LE CODE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE (COPYRIGHT).

21 mai 2013

'Le mauvais temps', Paul Guimard




« Sans doute, la vie n’est-elle pas faite pour les adolescents. (…) ils l’inventent pour la rendre semblable à eux mais l’illusion est brève. Lorsqu’ils s’aperçoivent que cette vie rêvée est en rupture de stock pour la plupart des dons qu’ils réclament d’elle, ils chavirent dans la mélancolie. Il n’est ni facile ni plaisant de changer de peau, d’autant moins que la mue des hommes s’accomplit à contresens, du papillon à la chenille, et que la perspective de perdre ses ailes et d’apprendre à ramper n’est pas exaltante. Alors on refuse, on se cogne contre les barreaux de la cage. »

C’est l’histoire de Monsieur Robert, cinquantenaire, veuf, mûr et lucide. C’est aussi l’histoire de Bob, adolescent inexpérimenté, bohème, empli de craintes et d’illusions.
C’est finalement l’histoire d’un homme à l’intérieur duquel Robert et Bob se rencontrent, se découvrent, se heurtent l’un à l’autre, tentent de cohabiter jusqu’au jour où la femme qu’il aime lui propose de la rejoindre à Amsterdam. En proie à ses impulsions d’adolescent, Monsieur Robert prend la fuite et se réfugie dans sa Bretagne natale pour  prendre la mer sur son bateau. Surpris par le mauvais temps, il devra alors résister à une tempête qui se révèlera plus intérieure qu’extérieure…
Cette histoire est celle d’un homme, mais c’est surtout le récit d’une naissance, celle qui survient au terme d’un long et souvent douloureux cheminement vers soi-même, vers sa propre paix intérieure, vers l’âge adulte. Un cheminement nécessaire pour apprendre à vivre avec soi, avec les autres aussi. Parce que « C’est bon, les autres, c’est chaud, c’est nécessaire. »
A travers les traits du roman, Paul Guimard décrit le parcours initiatique que chacun de nous aurait la possibilité d’accomplir pour réconcilier l’adolescent et l’adulte qui s’empêchent d’exister pleinement l’un l’autre. Il s’agit de laisser s’éveiller cet Autre que nous cherchons sans cesse ailleurs alors qu’il sommeille en nous, en chacun de nous, tout comme le beau temps et le mauvais.
Oser laisser derrière soi l’enfant rempli d’illusions et d’attentes irréalistes pour accepter enfin la vie telle qu’elle est, jouir pleinement des instants de bonheur avec la conscience de leur valeur et de leur impermanence qui les rend tellement précieux.
« Il faudrait parvenir à cette sagesse élémentaire de considérer les ténèbres où nous allons sans plus d'angoisse que les ténèbres d'où nous venons. Ainsi, la vie prend son vrai sens : un moment de lumière. »
C’est une lutte intérieure, un combat contre cette partie de soi qui nous limite, nous fait fuir quand nous gagnerions à rester, nous taire quand quelques mots pourraient tout changer, s’abstenir quand il aurait valu la peine d’oser. Une « bourrasque intime » qui fait chavirer l’être tout entier pour le forcer à nager plutôt que de se laisser dériver par le courant.
Un roman métaphorique plein de tendresse, de douceur et d’amertume, riche d’enseignements et de sagesse.
Mélina Hoffmann
 
Chronique publiée dans le BSC NEWS MAGAZINE de Mai 2013