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Ma vie, c'est du bonheur à ne plus savoir qu'Enfer. Journaliste littéraire et culturelle pour le BSC News Magazine, je suis une passionnée, amoureuse de la vie et boulimique de mots. Ceux que je dévore à travers mes très nombreuses lectures, et ceux qui se dessinent et prennent vie sous ma plume. Je travaille actuellement à l'écriture d'un roman, d'un recueil de poèmes ainsi que d'un recueil de tweets. A mes heures perdues, s'il en est, j'écris des chansons que j'accompagne au piano. Mon but dans la vie ? Réaliser mes rêves. Work in progress... LES TEXTES ET POÈMES PRÉSENTS SUR CE BLOG SONT PROTÉGÉS PAR LE CODE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE (COPYRIGHT).

7 déc. 2011

Chronique 'Fragments du métropolitain'


« Dans le couloir de correspondance, tu as posé tes pas sur les miens. Nous avons marché en cadence. Ton pied gauche sur mon pied gauche. Mon pied droit sur ton pied droit. Deux amoureux n'auraient pu épouser leur rythme avec autant d'harmonie. En as-tu conscience ? J'ai accéléré car, tout de même, nous ne nous connaissions pas. »
Il est le lieu des rencontres avortées, des sourires oubliés, des regards fuyants, des solitudes partagées. On s'y croise, on s'y bouscule, on s'y observe, on s'y retrouve... où on s'y perd. On s'y mélange, que l'on vienne d'ici... ou d'ailleurs. Pour certains ce n'est qu'un lieu de passage, pour d'autres c'est devenu un lieu de subsistance où la chaleur humaine est en libre-service.
Prisonnier de ses souterrains, le métro glisse tel un serpent d’une station à une autre, avalant et régurgitant inlassablement son flux de voyageurs pressés, perdus -parfois ni l’un ni l’autre - soumis bien malgré eux à une promiscuité dérangeante ou au contraire agréable. Au sein de ce microcosme urbain se jouent chaque jour des scènes ordinaires, parfois étranges, parfois drôles, parfois touchantes, dans lesquels s’improvisent les rôles, éphémères.
C’est cette atmosphère particulière, familière à beaucoup d’entre nous, qu’a voulu retranscrire Jeanne Truong au travers de ces nombreuses anecdotes piochées ça et là, au détour d’une ligne, d’une station, d’un couloir. Des fragments de vie à l’état brut, qui nous ramènent inévitablement à nous-mêmes et à nos mouvements d’âme. « En côtoyant ces galeries de portraits, traversées par tant d'étranges autochtones, je ne fais que descendre au cœur de la nudité humaine. »
Il y a cette jeune fille qui cherche une terre d’asile pour son esprit dans les mots de Proust ; cet homme au chômage qui passe ses journées à demander l’heure pour goûter à un semblant de communication avec le monde qui l’entoure ; et puis ces corps qui se frôlent, se heurtent, bien souvent dans la plus parfaite indifférence…
Aux anecdotes se mêlent les commentaires de l’auteur sur la façon dont fonctionne cette drôle de société souterraine : « De manière générale, pour réussir à obtenir une aumône, il ne faut pas avoir l'air trop pauvre ni trop malheureux. Ce qui arrache les larmes intérieures à la foule, c'est le clochard au visage digne, le pierrot muet, fantôme imperturbable dont l'inexpression inspire ce qu'on veut bien y mettre. Le mime froid et blanc au-delà des amertumes, retranché dans une solitude insondable. Ce qui a encore plus de succès, c'est l'homme qui a un langage châtié, celui qui sent les études, l'érudit, l'homme de lettres, le poète déchu, celui qui tient sa phrase avec son vocabulaire livresque. »
Un livre contemporain qui nous invite à nous attarder quelques instants (de plus ?) sur celles et ceux avec lesquels nous cohabitons chaque jour, dans l’espace clos de wagons ; ces compagnons de voyages que nous ne choisissons pas, que nous croisons seulement, sans jamais les rencontrer.

Chronique publiée dans le BSC News Magazine de novembre 2011.

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