« On s'habitue trop rapidement à
notre prétendue existence, au petit nid douillet que l'on s'est créé. Parfois,
il est nécessaire de recevoir une bonne claque dans la figure pour se rendre
compte qu'on est à côté de la plaque. Qu'on vit en dehors de soi. En dehors de
sa propre vie. »
Il est
parfois dur de se sentir chez soi quelque part lorsqu’on se sent un étranger
partout, de trouver à quoi s’accrocher lorsque tout s’effondre.
Enfant,
la vie nous fait des promesses qui nous bercent tendrement jusqu’à ce que nous
soyons en âge de comprendre qu’elle ne les tiendra pas. Alors, il faut se
lancer. Tenter de se construire dans un monde qui tombe en ruines.
Paris,
début des années 1990. Il y a Sara, Ben, Mimi, Jane et quelques autres, errant
dans les rues de Paris. Il y a Serge Gainsbourg, Nirvana, Brian Adams ou encore
Alice in Chains qui envahissent les ondes. Il y a des rêves en couleur et des
réalités sombres, des espoirs fragiles et des désillusions, des quêtes d’ici et
des envies d’ailleurs.
Ben fuit
le confort de maisons, de familles où il lui faudrait jouer un rôle, dissimuler
sa peine de « petit garçon abîmé par le
temps et usé par l'espoir », pour des squats où il peut être lui et laisser
s’exprimer librement sa tristesse. Le jeune homme traîne ainsi ses incertitudes
et son vague à l’âme dans les rues de Paris. Ces mêmes rues qu’arpente Sara,
jeune allemande qui a quitté Berlin, sa ville natale dans laquelle elle se
sentait trop à l’étroit, pour débuter une nouvelle vie en France. Et puis il y
a Jane aussi, qui vit auprès de son grand-père et tente d’échapper à cette vie un
peu trop belle que ce dernier a rêvée pour elle…
« Elle était démunie. Libre, mais
démunie. Pépé l'avait gavée d'un bonheur prémâché. Il n'avait pas jugé utile
d'armer sa petite-fille pour affronter la vraie vie. Et elle s'était laissée
emporter par un tourbillon imaginaire. Il avait voulu la protéger en l'élevant
dans un environnement rose bonbon peint avec amour. Trop d'amour. Trop de
sirop. Des couleurs vives que même la pluie battante ne délavait pas. Une
maison de poupées. Une prison dorée. Mais que se passait-il si l'on creusait
l'un des murs. »
Julia
Germillon signe ici un premier roman doté – en plus d’un titre et d’une
couverture envoûtants - d’un sacré caractère ! Dans un style pudique et
armée d’une plume habile, elle nous fait redécouvrir Paris sous le pas de ces
personnages attachants, de ces jeunes gens révoltés en quête d’un peu de
sincérité, de quiétude, même s’il ne s’agit que du confort précaire d’une
illusion. Même si, aussi loin que l’on fuit, la réalité nous suit, notre passé
nous rattrape, toujours. Même si nous ne sommes finalement tous que des
funambules, avançant pas à peu au cœur de l’incertitude de nos vies, qui ne
tiennent qu’à un fil.
Mélina Hoffmann
Chronique publiée dans le BSC News Magazine de Juin 2012.
Interview de Julia Germillon : http://mymelina.blogspot.fr/2012/06/interview-julia-germillon.html
Chronique publiée dans le BSC News Magazine de Juin 2012.
Interview de Julia Germillon : http://mymelina.blogspot.fr/2012/06/interview-julia-germillon.html
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire