Rencontre avec Marie Barrillon
Il est des auteurs qui, d’une façon incroyablement injuste et
injustifiée, passent inaperçus dans un paysage littéraire surchargé d’œuvres
qui n’ont franchement pas de quoi laisser un souvenir impérissable. Vous dévorez
sans doute, comme moi, bon nombre de romans parmi ceux qui s’installent en
« tête de gondole ». Vous cédez, pression oblige, à l’appel de ces
auteurs dits « à succès », dont les romans semblent avoir été
éparpillés un peu partout, comme un tapis de feuilles à l’arrivée de l’automne.
Et puis, souvent, comme moi, vous refermez le livre avec la désagréable
sensation d’avoir été trompé. « C’est tout ? Mais où est le coup de
cœur qu’on m’avait promis ? ». Une autre fois peut-être...
Et puis, un jour, par un heureux hasard, vous tenez entre vos mains un
livre dont personne ne vous avait jamais parlé, dont vous n'aviez vu la
couverture nulle part, d'un auteur dit "inconnu". Et pourtant : voilà
la pépite que vous attendiez. Un livre qui s'adresse directement à votre cœur
et vous emporte dans son tourbillon de mots et d'émotions.
Marie Barrillon est de ces auteurs de l'ombre qui possèdent une plume
dont la sensibilité et la poésie mériteraient certainement plus ample
reconnaissance. Chacun de ses livres est une pépite de douceur et d’amour, à
l’image de la personne qu’elle est. Ses mots sonnent juste et semblent se
disperser en nous pour adoucir un peu nos vies.
A l’occasion de ma chronique de son livre Leçons de vies, paru
en août 2010 aux éditions Le Manuscrit, et de la sortie de son livre Camille,
regarde devant toi ! chez Praelego Editions, j’ai souhaité donner la
parole à cette auteur talentueuse et généreuse.
INTERVIEW
Bonjour
Marie ! Je suis ravie de t’accueillir dans les pages du BSC News
Magazine ! Ton livre Leçons de vie est débordant d’émotions. On y
sent la force et la fragilité d’une femme trop souvent éprouvée par la vie, d’un
cœur écorché vif, lourd de trop de drames et de déceptions. Aussi, la première
question qui me vient est une question météo : quel temps fait-il sur ta vie,
Marie ?
Disons que le temps y est mitigé. Parfois, il y fait beau et à d’autres
moments, il y fait un peu gris. Cependant, les gros orages du passé semblent se
tenir à distance… pour l’instant !
Néanmoins,
il faut rester conscient que rien n’est jamais acquis. De ce fait, nous ne
sommes jamais à l’abri d’une bourrasque ou d’une tempête.
La vie est
une multitude d’instants incertains, ses aléas arrivent toujours de manière
inopinée. Alors, je reste sur mes gardes… et j’observe ce qui se passe tout
près… mais aussi, un peu plus loin.
Tu t’adresses directement à nous, lecteurs, en nous invitant à nous
accorder à tes pas. Où nous emmènes-tu ainsi ?
Je serai tentée de dire : dans un univers
différent. En fait, lorsque j’écris, je souhaite emmener mes lecteurs ailleurs
pour leur permettre de s’évader de leur quotidien. Les faire voyager ou rêver
aussi dans mes histoires. C’est important d’offrir à l’esprit l’opportunité de
voyager.
Je ne sais
pas si j’y parviens, mais chaque fois j’y mets tout mon cœur. Voir ailleurs, ce
n’est pas seulement regarder s’il y fait meilleur ou moins bon que "chez
nous". C’est constater qu’il y a mieux certes, mais aussi pire, et cela
permet souvent de relativiser sur sa propre condition.
L’intérêt
pour moi dans le quotidien que nous sommes amenés à traverser, c’est que même
si nous ne sommes pas toujours heureux, l’important est de ne pas être
malheureux. C’est cet état d’esprit que j’adopte, je ne peux pas dire que je
sois heureuse mais dans tous les cas, je ne suis pas (plus) malheureuse. Ça
aussi c’est un peu ma météo.
Il ne faut pas être nombriliste, notre époque ne nous
le permet pas. Il suffit de regarder ce qui se passe dans le monde pour
comprendre que le nombrilisme, l’égoïsme, l’individualisme n’apportent rien de
bon et tuent la communication. Alors, si je peux faire rêver mes lecteurs, je
n’en demande pas plus car c’est mon but premier.
Tu parles de l’amour comme source d’amertume, de colère, de déception.
L’amour qui te « traîne sur son chemin dont la seule vision n’est
qu’ombre ». Alors forcément on se demande si Marie Barrillon croit
toujours en l’amour, « malgré tout » ?
Bien sûr que je crois toujours en l’amour. N’est-ce
pas une des émotions vitales à la vie ? Je ne pourrais vivre sans aimer,
quelque soit la forme de ce sentiment ; amoureux, amical, filial…
L’amour se présente toujours lorsqu’on ne l’attend
pas. Ne plus y croire serait ne plus savoir regarder en face l’opportunité de
le laisser nous combler et par conséquent lui imposer des barrières.
A mon sens,
il est une des composantes essentielles à la vie. L’une ne peut aller sans
l’autre. Beaucoup de gens malheureux sont des personnes qui manquent d’amour.
Si tout le
monde y croyait encore avec force, la face du monde serait bien différente.
Mais, ce n’est là que mon avis !
Tu définis l'écriture comme un « remède aux maux du cœur »
dans lequel tu trouves ou retrouves le calme et la sérénité dont la vie parfois
te prive. As-tu toujours eu ce rapport à l’écriture ? Comment est né ce
lien si particulier qui te lie aux mots ?
Ce rapport à l’écriture m’est apparu alors que je
n’étais encore qu’une adolescente. En recherche d’identité, comme on l’est
souvent à cette période cruciale de la vie, et dans un monde qui me semblait si
différent de ma propre personnalité, je ne me trouvais nulle part. A cela s’est
ajouté le divorce de mes parents qui m’a un peu plus ébranlée. Je me suis
réfugiée dans un premier temps dans la lecture. Je me retranchais sur moi-même
et dans les pages des livres. Je trouvais là, matière à voyager dans
"d’autres vies".
C’est mon père qui, involontairement, m’a incitée à
l’écriture. Devant tant de lectures, il souhaitait que je fasse un résumé des
livres que je lisais pour voir si j’en avais saisi tout le sens. De fil en
aiguille, j’ai cherché autre chose. J’ai donc commencé à écrire de manière plus
personnelle. Au début, ce n’était que des mini histoires, puis c’est devenu non
seulement une passion, mais aussi cet exutoire qui me permettait de m’échapper,
de m’évader, de respirer… et par conséquent, de me retrouver.
Ça ne m’a
plus jamais quittée. A présent, vivre sans écrire me serait impossible, ce
serait comme s’il me manquait quelque chose d’essentiel, de vital… comme
l’oxygène.
Ne penses-tu
pas que l’écriture peut, parfois, avoir l’effet inverse ? C’est-à dire, là
où nous croyons évacuer la douleur qui nous fige, ne faisons-nous pas
finalement que nous y enliser un peu plus, lui donner davantage de consistance
pour mieux nous y perdre ?
Je ne pense
pas ou en tout cas, pas en ce qui me concerne. Il est vrai que chaque personne
a ses propres réactions y compris intérieures, donc je ne dirais pas que ça
n’arrive pas, c’est juste que ce n’est pas mon cas.
Lorsque certains vont voir un psy pour les aider dans
des moments difficiles, moi je prends mon stylo. C’est lui mon psy ; mon
stylothérapeute.
Par contre, là où je suis convaincue c’est que de tous
temps, nombre d’auteurs, d’écrivains, voire même les plus grands, ont
couramment écrit dans la souffrance et souvent là se trouvaient leurs plus
beaux écrits.
As-tu des rituels d'écriture ? Des lieux ou des
musiques dans lesquels tu puises ton inspiration ?
Je ne sais
pas si on peut appeler cela des rituels, cependant j’ai effectivement quelques
petites habitudes, comme le choix d’un stylo plutôt qu’un autre ainsi que la
couleur, celui du cahier ou des feuillets. J’écris presque toujours sur papier
avant de tout reporter sur mon ordinateur. J’ai besoin de ce contact.
Par contre,
j’écris régulièrement dans le silence quand cela m’est possible. Toutefois,
lorsqu’il y a trop de bruits environnants, j’opte pour des musiques calmes,
mais sans paroles pour ne pas être déconcentrée par les voix. Les musiques de
relaxation me conviennent bien comme "Pierre de lumière" ou "Les
sources du temps" par exemple.
En ce qui
concerne les lieux, j’y ai là aussi quelques habitudes. Les brasseries, les restaurants,
dont un en particulier. Je sais, c’est assez paradoxal pour quelqu’un qui aime
écrire dans le silence, mais parfois j’aime aussi sentir la vie autour de moi.
J’aime également écrire chez moi, bien sûr.
Par contre, ce qui est essentiel c’est que je ne
m’impose jamais d’horaires, partant du principe que l’on ne peut pas donner
rendez-vous à l’imagination. C’est elle qui décide et quand elle est là, c’est
elle qui dirige.
Ton roman Camille,
regarde devant toi ! paraît
ce mois-ci chez Praelego Editions. Peux-tu nous dire quelques mots sur ce
livre ?
Alors juste quelques mots (sourire), parce qu’il faut
tout de même garder la surprise pour les lecteurs. "Camille, regarde
devant toi !" est une histoire tout droit sortie de mon imaginaire,
mais qui pourrait arriver à chacun d’entre nous. Elle est triste au début, mais
belle à la fin. C’est en fait dans ce cheminement que je souhaite l’évolution
de mes romans. Dans tous les cas, la fin doit toujours être belle. C’est ce que
je m’impose pour que les lecteurs aient la sensation de terminer sur une belle
note, et ce n’est pas de trop dans le monde dans lequel nous vivons.
Quelques soient les malheurs que la vie nous inflige
parfois, il y a presque toujours une issue positive au bout d’un chemin
chaotique. La vie est parfois une bataille où il faut avoir l’envie pour la
mener mais surtout pour la remporter, ce que "Camille…" n’a plus à un
moment donné. Seule la force de l’amour tant amoureux que familial ou amical
parviendra à lui redonner cette envie. Ce n’est cependant pas un roman
d’amour !
La préface a été réalisée par Robert Aveillan, auteur
également. Il a beaucoup aimé ce roman et les propos qu’il m’en a tenus m’ont
beaucoup émue.
Tu as créé et dirige La Revue 100% Auteurs, une revue collective indépendante dont la
vocation est de faire découvrir des auteurs. Comment est née cette initiative ?
A force de
chroniquer des livres notamment d’auteurs peu ou pas connus, j’étais triste de
constater que beaucoup d’entre eux n’avaient pas la visibilité qu’ils
méritaient. L’idée de la revue est venue un peu sur un coup de tête.
Lorsque j’ai fait le premier numéro, c’était une
version test. Je ne pensais vraiment pas que cela plairait. Ce numéro a
pourtant obtenu 300 lectures le premier mois, rien que par le bouche à oreille,
ce qui m’a confortée dans l’idée que je devais aller plus loin dans ce projet.
De nombreux auteurs me contactent pour pouvoir bénéficier de cette visibilité.
C’est un peu un cheval de bataille.
Je suis
entourée au sein de la revue par des chroniqueurs comme Clément Chatain depuis
le début ou Fanny Lebez depuis peu et dont j’aime beaucoup la plume. Ils sont
bénévoles, tout comme moi, volontaires et constants. De vrais soutiens. J’adore
travailler avec eux, et ce qu’il ne faut pas oublier c’est que ces personnes
bénévoles n’agissent que parce que c’est la passion qui les anime, tout comme
moi.
Tout ce que
nous faisons ou mettons en place comme les partenariats avec La Fringale
Littéraire (www.lafringalelitteraire.com)
ou My Major Compagny Books (www.mymajorcompanybooks.com/)
est toujours dans l’intérêt des auteurs que nous présentons et permet peut-être
de leur ouvrir une petite porte sur le monde que les médias traditionnels ne
leur accordent pas.
Quels sont les
livres qui t'ont le plus marquée ? Tes derniers coups de cœur
littéraires ?
Le tout
premier que j’ai lu est certainement celui qui m’a le plus marquée. Je ne
devais pas avoir plus de 13 ou 14 ans à l’époque et je m’en souviens encore. Il
s’agit de "Un espoir infini" d’Odile Steller. C’est l’histoire d’un
enfant atteint de Leucémie. Il m’a suivi durant toutes ces années et est
toujours dans ma bibliothèque.
Sinon, beaucoup de livres m’ont marquée depuis. Et
aujourd’hui encore, j’en trouve parfois d’excellents, il suffit juste de les
découvrir, et encore une fois, pas forcément chez les auteurs connus et
reconnus. Personnellement, je m’intéresse principalement à ceux que l’on ignore
trop souvent, il n’y a qu’à voir mes chroniques d’ailleurs pour le comprendre.
As-tu
d'autres projets à l’heure actuelle ?
D’autres
projets, oui, bien sûr. Insatiable, j’ai toujours des projets en cours et
rarement un seul.
Je viens d’achever le roman suivant. Et je suis sur
l’écriture de deux autres. J’ai également terminé mon second recueil de
poésies, très différent du premier, et pour lequel je suis à la recherche d’un
éditeur lorsque j’ai un peu de temps à y consacrer. Ce qui est rarement le cas.
Souvent le temps me manque cruellement pour faire tout ce que je souhaite
réaliser. Si les journées pouvaient contenir 48 heures à elles-seules, ça
m’arrangerait. Comme je le dis souvent : "Mes jours manquent
d’heures, pour en faire plus". Au fil du temps et de mes activités, c’est
vraiment devenu ma devise.
J’ai encore
plein de projets à bâtir, j’espère juste avoir le temps de les accomplir.
Retrouvez
cette interview dans le BSC News Magazine de janvier 2012.
Chronique du livre de Marie Barrillon 'Leçons de vie' à découvrir ICI.
Chronique du livre de Marie Barrillon 'Leçons de vie' à découvrir ICI.
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