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Ma vie, c'est du bonheur à ne plus savoir qu'Enfer. Journaliste littéraire et culturelle pour le BSC News Magazine, je suis une passionnée, amoureuse de la vie et boulimique de mots. Ceux que je dévore à travers mes très nombreuses lectures, et ceux qui se dessinent et prennent vie sous ma plume. Je travaille actuellement à l'écriture d'un roman, d'un recueil de poèmes ainsi que d'un recueil de tweets. A mes heures perdues, s'il en est, j'écris des chansons que j'accompagne au piano. Mon but dans la vie ? Réaliser mes rêves. Work in progress... LES TEXTES ET POÈMES PRÉSENTS SUR CE BLOG SONT PROTÉGÉS PAR LE CODE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE (COPYRIGHT).

25 janv. 2013

'Le premier oublié', Cyril Massarotto




« - Bonjour, maman.

- Qui êtes-vous ?

Ainsi, mon univers a basculé : en une phrase, je suis devenu le premier oublié. »

Des souvenirs qui filent, s’embrument, toute une vie qui s’échappe, des liens qui réinventent leur nature, des instants sur lesquels le temps n’a plus de prise, des attitudes soudainement libérées des conventions sociales, imbibées de la spontanéité d’une enfance à jamais égarée…

Il a suffit d’un « vous » pour que Thomas comprenne que tout était en train de basculer. Un « vous » prononcé par sa mère, comme une gifle en plein visage. Quelques heures plus tôt, il était encore son fils. En l’espace d’une nuit, il était devenu un étranger.

Face à l’évidence de la maladie qui s’installe : le déni, l’envie de fuir, de contourner la réalité, de sourire… à la folie, pour ne pas souffrir. Pas tout de suite. Moins, peut-être.

« - Tu te rends compte, j'ai cru que ton père s'appelait Max, j'ai même cherché le prénom Max dans mon téléphone !

- Mais enfin, maman, Max est bien le prénom de papa !

- Ah, tu me rassures, je ne suis pas folle alors ! C'est encore ce foutu portable qui...

- Maman, papa est mort l'été dernier. »

Cyril Massarotto nous offre ici un regard croisé sur la maladie d’Alzheimer. Deux voix se font entendre à tour de rôle. Celle de Thomas, confronté à l’état de sa mère face auquel il se sent désarmé, impuissant, révolté, et celle de Thomas encore, mais qu’il prête cette fois à sa mère. Il exprime ainsi ce qu’il pense être ses angoisses à elle, ses interrogations, sa colère face à sa propre vie qui lui fait faut bond, ses mots. Des répliques touchantes, parfois brutales, qui nous plongent avec beaucoup de pudeur, de tendresse, et une pointe d’humour, au cœur de la maladie.

On rit quelques fois, et puis on a les larmes aux yeux devant cette mère et son fils qui se débattent avec la maladie, elle luttant contre l’oubli qui ne cesse de gagner du terrain, suppliant Alzheimer de ne pas lui voler tous ses souvenirs, de lui en laisser quelques-uns au moins, même les moins bons, et lui profondément bouleversé par les sentiments qu’il ressent, par cette mère qui ne le reconnaît pas, ces repères qui n’existent plus et cet amour brutalement mis à l’épreuve.

« Je ne sais plus si je l’aime.

Quand je vois cette enveloppe qu’on maintient en vie, je ne sais plus ce que je ressens. Cette sensation est insupportable, elle me dégoûte, je me dégoûte.  (…) tu es quoi alors ? Quand on n’est ni mort ni vivant, qu’est-ce qu’on est ? Qu’est-ce que tu es, maman ? »

Un livre poignant, qui nous chahute.

Mélina Hoffmann
Chronique publiée dans le BSC NEWS MAGAZINE de Janvier 2012  

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